Les bras m’en tombent. Le ministre du budget, celui donc qui est en charge de la collecte de nos impôts et de la lutte contre la fraude fiscale était, lui-même, et depuis de nombreuses années, un fraudeur. Mieux, il passait, au sein du gouvernement, comme l’apôtre de l’austérité.
La bonne âme nous appelait à l’effort pendant que 600 000 € dormaient sur ses comptes en banque en Suisse et à Singapour, autant d’argent ayant échappé à toute fiscalité en France.
Lorsque « Médiapart » a révélé l’affaire, Jérôme Cahuzac a juré ses grands dieux qu’il était blanc comme neige. J’entends encore son mensonge éhonté délivré aux députés avec des trémolos dans la voix. Honteux !
Mais sans doute ne sommes-nous qu’au début d’un feuilleton à épisodes.
« Le Monde » publiait, hier soir, des révélations sur les paradis fiscaux. Il y apparait que l’évasion fiscale est un sport de haut niveau. 120 000 sociétés-écrans sont recensées. Elles organisent la mise au vert des fonds. 1250 milliards échappent ainsi, chaque année, aux administrations fiscales de 170 pays, dont 60 milliards pour la France avec 130 noms d’évadés fiscaux français.
De quels moyens disposent nos services du fisc pour enrayer ce phénomène ? De l’équivalent d’une petite cuillère pour vider l’océan.
Les conflits d’intérêts entre le monde de la finance et celui de la politique ne conduisent évidemment pas à une volonté farouche de s’attaquer à cette pieuvre tentaculaire et ramifiée, qui dispose de cohortes de juristes et de fiscalistes chargés d’organiser l’évasion.
Nous découvrons ainsi avec stupeur que c’est un proche conseiller de Marine Le Pen, Philippe Péninque, ancien militant du GUD, avocat spécialisé dans le business, qui a ouvert le compte en Suisse de Jérôme Cahuzac en 1992. La patronne du FN voit ainsi se ternir l’image de blanche colombe qu’elle cultive à l’envi.
Le « Courrier Picard », de son côté, publie ce matin, deux pages sur les liens entre Jérôme Cahuzac et Eric Woerth, ancien ministre du budget de Sarkozy, lesquels auraient pratiqué le renvoi d’ascenseur. Woerth aurait stoppé des investigations, en 2008, portant sur la situation fiscale suspecte de Cahuzac, lequel, en juillet 2012, aurait innocenté Woerth au terme d’un rapport rédigé à la hâte dans l’affaire de l’hippodrome de Compiègne.
Bref, le tout relève du marécage malodorant, qui éclabousse toute la classe politique.
Mon groupe parlementaire a demandé, par la voix de son Président, André Chassaigne, une convocation extraordinaire du Parlement car il est plus que temps de faire le ménage, de purger la sphère politique, qui doit être en charge de l’intérêt générale, de ses rapports trop étroits avec le monde des affaires et de la finance et de combattre l’évasion fiscale.
Mon collègue, Alain Bocquet, député du Nord a produit un rapport sur les paradis fiscaux et préconise 60 mesures. Elles sont à l’ordre du jour.
Il y a urgence, car le sentiment grandit chez nos concitoyens que la classe politique est corrompue jusqu’à la moelle, ce qui n’est pas vrai si l’on considère tous les élus qui consacrent leur temps et leur énergie au service de l’intérêt commun. Dans un tel climat délétère, c’est la République et la démocratie qui s’affaiblissent.