La privatisation de Gaz de France figurera-t-elle au palmarès des mauvais coups de l’été ? Finalement, rien n’est moins sûr.
Dominique de Villepin voulait mener l’affaire au pas de charge et conclure, si ce n’est avant la fin du mois de juin, au moins avant le 14 juillet.
Il s’agissait de prendre prétexte de l’OPA hostile de l’italien Enel sur Suez pour engager la fusion privatisation de GDF-Suez. Et quiconque s’y opposerait prendrait évidemment la responsabilité de mettre Suez en danger.
La ficelle est certes un peu grosse mais il fallait boucler la boucle ouverte avec le loi du 9 août 2004 transformant l’entreprise publique EDF-GDF en deux sociétés anonymes dans le cadre de directives européennes destinées à ouvrir le marché de l’énergie à la concurrence et avec la loi d’orientation sur l’énergie de juin 2005.
Le Premier Ministre voyait l’occasion d’accélérer le mouvement avant l’ouverture totale du marché au 1er juillet 2007.
C’était sans compter sans l’opposition immédiate des organisations syndicales et sur le rejet persistant du libéralisme par l’opinion publique.
Cette dernière sait faire ses comptes : en 18 mois, la facture de gaz a grimpé de 30%, soit dix fois l’inflation. Qu’en sera-t-il quand il faudra rémunérer des actionnaires voraces ?
Le marché dérégulé de l’électricité pour les entreprises, quant à lui, a conduit à une hausse de 48% des tarifs en un an.
Même les députés UMP ont commencé à se dire que cela suffisait comme cela. Après le fiasco du CPE, les odeurs nauséabondes de l’affaire Clearstream, il serait temps d’arrêter. Comment allons-nous nous faire réélire, pensent-ils, d’autant que Sarkozy, alors ministre des finances en 2004, avait promis que la participation de l’Etat dans EDF et GDF ne descendrait pas sous la barre de 70% ?
Bref, de Villepin n’a pas de majorité pour son entreprise de bradage.
Le débat n’en reste pas moins ouvert : face à un libéralisme qui rêve de tout avaler, il est nécessaire de se doter d’un pôle public de l’énergie capable de faire face et de développer des coopérations avec d’autres partenaires comme Suez.